Session du 19 novembre 2010
Retrouvez ci-dessous l'explication de vote donnée ce matin lors de la discussion du schéma départemental "enfance et famille". Ce schéma a été adopté par 22 voix de la majorité départementale et 21 contre des élus du groupe des Forces de Progrès.
Première observation, générale :
S’il vous a échappé, un malaise grandit au sein des équipes de travailleurs sociaux sur le terrain dans notre département.
Ils sont de plus en plus nombreux à s’interroger sur le sens de leurs missions, sur la politique menée, sur les moyens qui leur sont accordés pour être aux côtés des familles et faire face aux difficultés.
Ils en ont assez des tâches bureaucratiques, des justificatifs sans cesse de plus en plus nombreux à produire ou l’absence de réponses.
Ils sont les premiers à constater l’augmentation des difficultés, la pauvreté grandissante, et les moyens pour y faire face leur sont très clairement comptés.
Ils se sentent mal compris, dénigrés dans leur travail, considérés comme de simples variables d’ajustement budgétaire. Aujourd’hui, les travailleurs sociaux du Conseil général de la Côte d’Or vont mal.
Aujourd’hui vous nous proposez ce schéma sur l’enfance et la famille. Dans ce domaine, nous sommes au cœur des compétences du département. Il répond à une obligation légale.
Les travaux préparatoires sont terminés depuis 2008. Or depuis, plus rien. Silence radio. Et tout d’un coup, dans une certaine précipitation, à la veille d’élections, la plupart de ces actions sont mises en oeuvre immédiatement. Cela signifie-t-il qu’un retard a été pris depuis 2 ans ? N’aurait-on pas déjà dû faire des choses ? Notamment en ce qui concerne les projets pour l’enfance et la cellule enfance en danger ?
L’examen prévu par la loi de 2007 qui intervient au 4eme mois a t il été mis en place ? Depuis quand ? Avec quels moyens ?
Concernant le suivi des actions, je note certaines incohérences :
On lit dans le schéma concernant la petite enfance, « l’accueil collectif reste un moyen efficace de lutter contre les inégalités. » Mais vous avez en réalité quasiment supprimé les aides au fonctionnement des crèches.
On lit dans le schéma l’intérêt de « promouvoir les actions de prévention en direction des enfants et des jeunes ». On parle bien de prévention spécialisée. Quel est son avenir aujourd’hui ? Quelles sont vos intentions ? Avez-vous l’intention de la maintenir ou de la supprimer ? La prévention est indispensable en milieu urbain, mais aussi dans certains de nos cantons ruraux. Ce ne sont pas des « équipes volantes » qui constitueront la meilleure réponse.
Sur la prise en charge des situations d’enfants, si la loi de 2007 encourage la mise en place de modalités différentes, vous proposez une « restructuration de l’offre d’accompagnement » qui se traduit par une diminution importante des places en établissement. Sachant que le placement judiciaire est le plus fréquent, que ferez-vous si la justice décide de plus de placement qu’il n’y a de places ? Pour un grand nombre de cas, l’accompagnement même renforcé en famille ne sera pas la meilleure réponse.
Les CPOM (Contrats Pluriannuels d’Objectifs et de Moyens) que vous proposez à la signature sont des contrats léonins, imposés le révolver sur la tempe sans laisser le choix. Vous partez du budget 2009 et vous le reconduisez à l’identique à compter de 2011 sans aucune augmentation. Comment faire face aux charges de fonctionnement des établissements avec un gel des moyens ? Ces choix mettent en péril la qualité des services, l’emploi et menacent même la pérennité à long terme de ces grandes associations, qui sont des partenaires historiques du Conseil général.
Je le dis ici de façon solennelle. En ce qui nous concerne, nous reprendrons la négociation de ces contrats dans le respect, la transparence, avec un diagnostic partagé, des objectifs partagés et étalés dans le temps. Nous aurons une démarche innovante en recherchant ensemble à allier la rigueur et le qualitatif.
Ce qui est totalement en opposition avec votre approche qui ne vise que la diminution des moyens et des coûts sans vous préoccupez des dégâts humains et des besoins qui sont énormes.
Un seul chiffre dans ce domaine : 20000 enfants vivent en Côte d’Or en dessous du seuil de pauvreté. Ce chiffre m’a atterré. Indigné aussi. Comment peut-on accepter une telle situation ? Cela devrait entrainer une révolte, au bon sens du terme et des décisions pour lutter contre cette situation inacceptable et intolérable. Et il faudra tout faire pour y mettre fin. Quel avenir notre société propose t elle donc à ces enfants ? Sur ces 20000, près de 6000 ont moins de 5 ans aujourd’hui. Ont-ils fait le choix de naitre dans une famille pauvre ? Est-ce de leur faute, comme vous le dites pour les chômeurs ? Combien vont-ils s’en sortir ?
C’est notre responsabilité d’élus. C’est notre devoir. C’est une obligation morale.
La priorité de nos interventions devrait être déjà en direction de ces enfants, pour nos travailleurs sociaux (au lieu de leur imposer des tâches bureaucratiques), par l’accompagnement des familles, par la prévention si on veut leur préparer un avenir. Sinon, nous risquons de les retrouver un peu plus tard dans les foyers d’urgence, où vous nous prévoyez moins de places.
Ce schéma, plein de bonnes intentions, dresse un simple catalogue sans les moyens humains et financiers. Ce qu’il y manque, c’est une volonté politique, de vrais choix politiques.
Pour toutes ces raisons, nous voterons contre ce schéma aujourd’hui.